1. Conditions de délivrance et de maintien de licence
Une personne reconnue coupable, par un tribunal canadien ou par un tribunal étranger, de certaines infractions ou de certains actes criminels verra sa demande de délivrance de licence être refusée. S’il est titulaire d’une licence, elle sera annulée.
La déclaration de culpabilité a une incidence sur la licence pendant une durée de cinq ans suivant son prononcé, à moins que la personne obtienne un pardon. Toutefois, lorsqu’une peine d’emprisonnement est imposée, la période de cinq ans débute lors que cette peine se termine.
1.1. Infractions et actes criminels visés
Les antécédents judiciaires qui ont une incidence sur la délivrance et le maintien de la licence sont les suivants :
a) Une infraction à une loi fiscale ou un acte criminel relié aux activités que la personne entend exercer dans l’industrie de la construction.
L’infraction à une loi fiscale ou l’acte criminel doit être relié aux activités d’entrepreneur en construction, peu importe que ce soit dans un secteur assujetti (CCQ) ou non (hors construction). Ainsi, lorsqu’il y a déclaration de culpabilité à un acte criminel ou à une infraction à une loi fiscale, et que l’acte criminel ou l’infraction a été commis dans le cadre des activités de l’entrepreneur, la licence ne sera pas délivrée ou est susceptible d’être annulée.
Par exemple, une condamnation pour négligence criminelle (Code criminel) en raison de l’insouciance téméraire à l’endroit de la santé et de la sécurité d’un travailleur sur un chantier peut certainement être considérée comme reliée aux activités d’entrepreneur. Il en sera de même d’une condamnation pour avoir omis de déclarer d’importants revenus de contrats de construction ou pour ne pas avoir remis les taxes s’y rattachant.
Toute loi relative aux différentes formes de taxation (impôts, taxes) constitue une loi fiscale. En voici quelques exemples :
- Loi de l’impôt sur le revenu
- Loi sur la taxe d’accise
- Loi sur les impôts
- Loi sur l’administration fiscale
- Loi sur la taxe de vente du Québec
b) Les infractions ou actes criminels suivants, reliés ou non aux activités que la personne entend exercer dans l’industrie de la construction :
- un acte criminel prévu aux articles 45 ou 47 de la Loi sur la concurrence (collusion ou truquage d’offres);
- une infraction prévue aux articles 5, 6 ou 7 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (trafic, importation, exportation ou production de drogues);
- un acte criminel prévu au paragraphe 1 de l’article 380 du Code criminel (fraude);
- un acte criminel prévu à l’article 467.11 à 467.13 du Code criminel (participation aux activités d’une organisation criminelle);
- un acte criminel prévu à l’article 462.31 du Code criminel, lorsque la peine d’emprisonnement imposée est de cinq ans ou plus (recyclage des produits de la criminalité).
Le simple fait d’avoir été déclaré coupable de l’une de ces infractions ou de l’un de ces actes criminels, en lien ou non avec les activités que la personne entend exercer ou exerce dans l’industrie de la construction, est un motif pour refuser de délivrer la licence ou pour l’annuler.
À SAVOIR
La déclaration de culpabilité
Lorsqu’une personne plaide coupable à une infraction, cela équivaut à une déclaration de culpabilité prononcée par la Cour au terme d’un procès, avec les conséquences qui s’ensuivent.
1.2. Personnes visées
Si l’entrepreneur est une personne physique exploitant une entreprise individuelle, seules les condamnations contre elle sont prises en compte, sous réserve du cas de ses prêteurs traité au point 3.
Dans le cas d’une société ou d’une personne morale, les condamnations des personnes suivantes sont prises en compte :
- la société ou la personne morale elle-même;
- l’un de ses dirigeants;
Le dirigeant est défini comme le membre d’une société ou, dans le cas d’une personne morale, l’administrateur, l’actionnaire détenant au moins 10 % des droits de vote, le président, le responsable de la direction, le responsable de l’exploitation, le responsable des finances et le secrétaire d’une société ou toute personne qui remplit une fonction similaire, ainsi que toute personne désignée comme tel par résolution du conseil d’administration.
- l’un de ses actionnaires, peu importe le pourcentage d’actions (il existe une exception pour l’actionnaire d’une personne morale qui est un émetteur assujetti au sens de la Loi sur les valeurs mobilières (compagnie cotée en bourse);
- un gestionnaire à plein temps qui est répondant de la licence de la société ou de la personne morale;
- le dirigeant de l’un de ses membres dans le cas d’une société ou de l’un de ses actionnaires dans le cas d’une personne morale;
- le dirigeant d’une personne morale qui est actionnaire de l’entreprise qui demande ou détient une licence.
Les deux derniers cas visent à éviter qu’un voile corporatif soit utilisé pour contourner les dispositions concernant les antécédents judiciaires. Par exemple, l’entreprise A est titulaire de la licence dont l’actionnaire est la compagnie B. Dans ce cas, les antécédents judiciaires des dirigeants et des actionnaires de A et de B seront pris en compte aux fins de la licence de A.
2. Licence restreinte (contrats publics)
Une fois la licence délivrée, une restriction est indiquée à celle-ci lorsqu’il y a déclaration de culpabilité à certaines infractions ou à certains actes criminels ou qu’il y a inscription au registre des entreprises non admissibles aux contrats publics. Cette restriction exclut, pour une période donnée, l’entrepreneur des contrats publics québécois. Il ne peut plus :
- présenter de soumission;
- conclure un contrat;
- conclure un sous-contrat avec un entrepreneur dont la licence est restreinte lorsque ce sous-contrat se rapporte à un contrat public du Québec;
- poursuivre l’exécution des contrats en cours, sauf s’il obtient l’autorisation de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) à cet effet.
Un contrat public constitue un contrat auquel est parti le gouvernement du Québec ou un organisme dit « public », par exemple un ministère ou une agence du gouvernement, une société d’État, un centre de services scolaires ou une commission scolaire, un cégep, une université, un établissement de santé, une municipalité locale ou régionale ou une société de transport en commun.
2.1. Infractions et actes criminels visés
La licence comportera automatiquement une restriction en cas de déclaration de culpabilité aux infractions et aux actes criminels décrits ci-après.
a) Infractions et avis émanant de la Commission de la construction du Québec (CCQ) dans le cadre de sa réglementation.
La restriction est d’une durée de deux ans à compter du prochain maintien de licence ou au moment de sa délivrance, lorsque l’entrepreneur a :
- fait l’objet d’une suspension de travaux exécutoire par la CCQ; ou
- payé ou a été condamné à payer une réclamation représentant une somme qu’il aurait dû transmettre avec un rapport mensuel.
La restriction est d’une durée d’un an à compter du prochain maintien de licence ou au moment de sa délivrance, lorsque l’entrepreneur a été déclaré coupable au cours d’une période de 24 mois consécutifs d’avoir :
- refusé ou omis de transmettre l’information demandée par la CCQ;
- refusé l’accès au chantier à un représentant de la CCQ;
- détruit, altéré ou falsifié un registre, une liste de paie, le système d’enregistrement ou un document ayant trait à l’application de la loi;
- omis de s’enregistrer auprès de la CCQ;
- omis d’inscrire à son registre les heures travaillées par un salarié;
- omis d’indiquer à son rapport mensuel les heures travaillées par un salarié;
- omis de transmettre à la CCQ son rapport pour une période mensuelle de travail;
- utilisé les services d’un salarié ne détenant pas de carte de compétence.
Selon le nombre d’heures déclarées à la CCQ, la licence ne comportera une restriction qu’après un nombre déterminé d’infractions.
Nombre d’heures déclarées annuellement
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Nombre d’infractions
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0 heure
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2
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1 à 10 000 heures
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2
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10 001 à 49 999 heures
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3
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50 000 à 99 999 heures
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4
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100 000 ou plus
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5, plus 1 infraction pour chaque tranche de 100 000 heures de travail en sus de 100 000
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Exemple : L’entreprise ayant déclaré 45 000 heures à la CCQ se verra émettre une restriction à sa licence au moment de la déclaration de culpabilité ou du plaidoyer de culpabilité à la troisième infraction dans une période de 24 mois consécutifs.
Un entrepreneur en construction condamné pour une infraction entraînant la restriction de sa licence pour l’obtention d’un contrat public peut demander au Tribunal administratif du travail d’ordonner à la CCQ de ne pas tenir compte de l’infraction pour l’application du Règlement sur les restrictions aux licences d’entrepreneurs aux fins d’un contrat public.
b) Infractions ou actes criminels.
La licence comportera une restriction pour une durée de cinq ans suivant le prononcé de la déclaration de culpabilité, même si la personne en a obtenu le pardon. Ces infractions et ces actes criminels n’ont pas à être reliés aux activités que la personne exerce dans l’industrie de la construction.
Si la déclaration de culpabilité donne lieu à l’imposition d’une peine d’emprisonnement, la restriction demeure pour une période de cinq ans suivant la fin de cette peine d’emprisonnement.
Les infractions et les actes criminels visés sont les suivants :
- sous-paragraphe a du paragraphe 1 de l’article 380 du Code criminel (fraude);
- sous-paragraphe i du sous-paragraphe b du paragraphe 1 de l’article 380 du Code criminel (fraude);
- articles 45 ou 47 de la Loi sur la concurrence (collusion ou truquage d’offres);
- articles 467.11 à 467.13 du Code criminel (participation aux activités d’une organisation criminelle);
- articles 5, 6 ou 7 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (trafic, importation, exportation ou production de drogues);
- articles 62, 62.0.1 et 62.1 de la Loi sur l’administration fiscale et aux articles 68 et 68.0.1 (déclarations ou inscriptions fausses ou trompeuses);
- article 239 de la Loi de l’impôt sur le revenu (déclarations ou inscriptions fausses ou trompeuses);
- article 327 de la Loi sur la taxe d’accise (déclarations ou inscriptions fausses ou trompeuses);
- article 462.31 du Code criminel (recyclage des produits de la criminalité), lorsque la peine imposée est de cinq ans ou plus d’emprisonnement.
c) Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics (RENA)
La licence comportera une restriction lorsque le titulaire est inscrit au RENA, soit parce qu’il a commis une infraction prévue à l’annexe 1 de la Loi sur les contrats des organismes publics ou parce qu’il s’est vu refuser ou révoquer une autorisation de conclure des contrats publics ou des sous-contrats publics par l’autorité responsable de délivrer ces autorisations.
Toutefois, lorsqu’une autorisation à contracter avec des organismes publics est délivrée au titulaire de la licence par l’organisme responsable malgré les infractions et les actes criminels énumérés plus haut, la licence de ce titulaire ne comportera pas de restriction.
2.2. Personnes visées
Si l’entrepreneur est une personne physique exploitant une entreprise individuelle, seules les condamnations contre elle sont prises en compte.
Dans le cas d’une société ou d’une personne morale, les condamnations la visant elle-même, ou l’un de ses dirigeants ou l’un de ses actionnaires sont prises en compte.
La licence comportera également une restriction lorsqu’un dirigeant du titulaire de la licence est également dirigeant d’une société ou d’une personne morale dont la licence est restreinte, à moins que le titulaire de la licence ne démontre que l’infraction n’a pas été commise dans l’exercice des fonctions de cette personne au sein de la société ou personne morale.
2.3. Obligations
Le titulaire qui voit sa licence restreinte doit immédiatement communiquer à la RBQ le nom de chaque donneur d’ouvrage public pour lequel il a un contrat en cours d’exécution. Il doit également lui communiquer le nom et le numéro d’entreprise du Québec de toute société ou personne morale pour laquelle il est un dirigeant.
2.4. Effets
Le titulaire qui voit sa licence restreinte doit cesser d’exécuter tout contrat public, à moins que la RBQ l’autorise à poursuivre l’exécution du contrat à la suite de la demande du donneur d’ouvrage public. La RBQ peut assortir son autorisation de conditions, comme demander que le titulaire de la licence restreinte soit soumis, à ses propres frais, à des mesures de surveillance et d’accompagnement.
Le donneur d’ouvrage public n’a pas à obtenir l’autorisation de la RBQ pour faire exécuter par le titulaire de la licence restreinte une garantie découlant du contrat.
3. Prêteurs
Toute personne qui demande ou détient une licence doit fournir la liste de ses prêteurs au terme d’un contrat de prêt d’argent, accompagnée d’une déclaration de chaque prêteur indiquant s’il a été déclaré coupable, dans les cinq ans précédant la date du prêt, de certaines infractions ou de certains actes criminels. Il s’agit des mêmes infractions et actes criminels que ceux identifiés précédemment au point 1.1, en les adaptant aux activités de prêteur.
3.1. Personnes visées
Les prêteurs dont il est question sont les prêteurs du titulaire d’une licence et ceux qui prêtent personnellement à un dirigeant lorsque le titulaire est une société ou une personne morale.
Si le prêteur est une société ou une personne morale, tous ses dirigeants doivent être identifiés et déclarer s’ils ont des antécédents judiciaires.
Les prêteurs dits « institutionnels », qui sont autorisés à agir à ce titre en vertu de lois particulières, comme les caisses populaires, les banques, les assureurs, les sociétés de fiducie ou d’épargne ne sont pas visés. L’exigence d’identification ne vise pas non plus les comptes clients des fournisseurs de services et de matériaux, les avances des actionnaires, les marges et les cartes de crédit, ou les crédits-bails. Le but de la loi est de vérifier la provenance des prêts privés.
3.2. Effets
La déclaration de culpabilité d’une des personnes visées peut entraîner le refus de délivrance d’une licence.
Elle peut également entraîner la suspension ou l’annulation de la licence lorsque le titulaire de la licence conclut un prêt d’argent avec un prêteur alors qu’il a été avisé par la RBQ que ce prêteur ou l’un des dirigeants de ce prêteur a été trouvé coupable d’avoir fait une fausse déclaration dans un document ou de l’une des infractions ou de l’un des actes criminels identifiés au point 1.1.
3.3. Infraction pénale
L’entrepreneur qui est parti à un contrat de prêt d’argent alors que son prêteur refuse ou omet de fournir la déclaration au sujet de ses antécédents judiciaires s’expose à une amende pouvant aller jusqu’à 88 515 $ (montant indexé annuellement).
Il en est de même si l’entrepreneur sait que son prêteur ou l’un de ses dirigeants, dans les cinq ans précédant le prêt, a été déclaré coupable d’une des infractions identifiées au point 1.1, en les adaptant aux activités de prêteur.
Les renseignements fournis par le titulaire de licence doivent être exacts, complets et faire état de la situation réelle et actuelle de l’entreprise. Il a l’obligation de maintenir ces renseignements à jour auprès de l’autorité qui lui délivre la licence, en l’avisant sans délai de tout changement.
Toute fausse déclaration constitue une infraction qui peut entraîner une amende allant jusqu’à 44 257 $ pour une première infraction (montant indexé annuellement), en plus d’avoir un possible impact sur la licence.
Toutes ces mesures ont été adoptées par le gouvernement dans la Loi sur le bâtiment dans le but d’éviter que des personnes avec certains antécédents judiciaires s’infiltrent dans l’industrie de la construction. Ces mesures doivent être prises au sérieux et faire l’objet de vérifications serrées.
Note : Le présent document constitue un aide-mémoire et il vous est transmis à titre informatif seulement. Il n’a pas de valeur officielle. Pour toute référence légale, l’usager doit se référer aux textes officiels des lois et des règlements publiés dans la Gazette officielle du Québec. Pour plus de détails, consultez le Service de la qualification de la CMMTQ.